Cap Malheureux

Face au Coin de Mire

Situés à la pointe Nord de l’île, à quelques kilomètres de Grand-Baie, ces deux villages ont connu de bien étranges destinées. Faisant face au Coin de Mire, dont ils sont les plus proches, ils figurent aujourd’hui, parmi les adresses les plus « chics » de Maurice…

coin de mire

Préciser, dans une conversation, et sans avoir l’air d’y attacher la moindre importance, que l’on habite à Bain-Bœuf ou Cap Malheureux , c’est, à coup sûr, susciter une lueur d’envie dans le regard de votre interlocuteur, tant cette petite portion de la côte mauricienne est réputée ! Et il y a de quoi ! Vivre « pieds dans l’eau », dans une superbe villa dont le jardin ouvre directement sur la plage, avec, pour panorama, la silhouette triangulaire du Coin de Mire, est un privilège réservé aux plus grosses fortunes de l’île et à de riches expatriés… C’est aussi vivre dans une portion du territoire mauricien marqué par l’histoire…

Bain Bœuf doit probablement son nom au débarquement régulier de bœufs vivants. Avant que des cargos mixtes fassent la liaison entre Port-Louis et Rodrigues, les bœufs rodriguais étaient embarqués sur des goélettes dont la plupart venaient débarquer leur cargaison beuglante, face au Coin de Mire. Le faible tirant d’eau des goélettes leur permettait de s’approcher au plus près du rivage. Mais pour les derniers mètres, les bovins étaient poussés à l’eau et finissaient leur croisière à la nage… d’où le nom du village !

Un peu d’histoire

Mais ce sont d’autres passagers, d’ailleurs eux aussi en provenance de Rodrigues, qui firent entrer ce hameau dans l’Histoire. Fin 1810, une importante escadre anglaise vint s’ancrer entre le Coin de Mire et le récif de corail. A bord des navires britanniques, près de vingt mille soldats, anglais et indiens, que Londres avait cantonnés à Rodrigues au cours des mois précédents… Sous la protection des canons des frégates anglaises, des centaines de chaloupes franchirent les passes étroites du lagon, pour débarquer les fantassins. En un raid éclair de deux jours, cette colonne anglaise devait en rejoindre une autre, débarquée, elle, dans les environs de Port-Louis, entrainant la reddition de la garnison française de l’Ile de France qui, pour plus de 150 ans, basculait sous domination anglaise !
Une stèle, érigée à l’ombre des filaos, sur la plage publique de Bain-Bœuf, commémore ce fait d’arme !

De la légende noire à la chapelle au toit rouge

L’histoire de Cap Malheureux, serait encore plus mouvementée… Si l’on en croit divers historiens, et le romancier français vivant à l’île de la Réunion, Daniel Vaxelaire, ce sont d’abord des pirates et flibustiers qui s’y implantèrent ! Mais ces aventuriers de l’océan n’étaient pas tous de grands marins, et si le Coin de Mire leur fournissait un point de repère fiable, l’étroitesse de la passe, les brisants à fleur d’eau et quelques rochers mal placés auraient causé de nombreux naufrages… justifiant ainsi le nom terrible attribué à cette portion de la côte ! Des négriers de retour des côtes africaines ou malgaches y auraient ensuite déchargé leur cargaison humaine… renforçant encore la terrible réputation du lieu !

On est, aujourd’hui, très loin de cette légende noire et Cap Malheureux est devenu, paradoxalement, une promesse de bonheur pour les dizaines de couples qui, chaque année, viennent y célébrer leur union ! L’enregistrement civil du mariage se déroule alors sur la plage, avec l’éternel Coin de Mire en toile de fond, alors que la cérémonie religieuse est célébrée dans la Chapelle de Notre Dame Auxiliatrice…

Cette minuscule église au toit rouge vif, posée en bord de mer est devenue un monument national, et sans doute le site mauricien le plus photographié !

eglise cap malheureux