Sites historiques

Un patrimoine historique encore peu connu

Des lagons somptueux, des plages magnifiques, de superbes hôtels et villas pieds dans l’eau et une population accueillante… C’est sur ces quatre piliers que s’est construite l’excellente réputation de l’île Maurice. Si rien de tout cela n’est faux, il serait pourtant dommage de s’arrêter à ces quelques atouts. Les visiteurs étrangers sont de plus en plus nombreux à en prendre conscience, et parmi les aspects de notre île qu’ils souhaitent mieux découvrir, le patrimoine historique tient une place prépondérante.

Dans un pays multi-ethnique, la relation à l’histoire est forcément compliquée… Chaque épisode historique se rapporte plus particulièrement à une communauté et sa célébration peut être perçue comme exclusive. Et quand, cette histoire est, de plus, marquée par la violence coloniale, l’esclavage et la déportation, on comprend que les symboles soient maniés avec précaution. Cela explique, sans doute, pourquoi pendant si longtemps, l’île Maurice restait si discrète sur son passé ancien, pour ne célébrer que les réussites de l’après indépendance. Pour le reste, quelques clichés, comme la disparition du dodo, l’odyssée de Paul et Virginie, l’administration de Mahé de la Bourdonnais, la victoire napoléonienne de Vieux Grand-port, ou les exploits du corsaire Surcouf semblaient suffire…

Depuis presque quinze ans, la simplicité de ces images ne satisfait plus, ni la curiosité des touristes étrangers, qui ont appris à s’intéresser aux réalités des pays qu’ils visitent, ni celle d’un nombre croissant de citoyens Mauriciens, désireux de mieux comprendre leur destin commun. L’affirmation internationale d’un « devoir de mémoire » a donc trouvé, ici aussi, un écho favorable, stimulant les recherches historiques, les fouilles archéologiques et les projets de restauration ou de préservation de « lieux de mémoire ». Ces préoccupations, relativement nouvelles, ici, ont été fortement encouragées par l’inscription de deux sites mauriciens à la liste du « Patrimoine de l’humanité » de l’UNESCO : le Morne Brabant et l’Aapravasi Ghat ! On ne s’étonnera donc pas de trouver ces deux sites en tête de la liste des sites historiques à visiter sur l’île Maurice !

Le Morne Brabant

Situé au sud de l’île, le Morne Brabant est un énorme promontoire rocheux qui surgit brutalement et occupe l’essentiel d’une petite péninsule. Géologiquement remarquable, ce piton doit sa renommée au rôle qu’il aurait joué dans l’épopée du marronnage. Si l’on en croit la légende, son sommet a longtemps servi de refuge inexpugnable aux esclaves évadés. C’est une véritable communauté rebelle qui se serait ainsi établie sur le Morne Et quand, quelques jours après la proclamation officielle de l’abolition de l’esclavage à Maurice par les autorités coloniales britanniques, ces esclaves marrons aperçurent un groupe de soldats venant à leur rencontre, ils pensèrent que l’on venait les capturer et ils préférèrent se suicider en se jetant du haut de la falaise…Alors que le détachement anglais venait leur annoncer qu’ils étaient libres. Si les recherches documentaires et les fouilles archéologiques sont encore loin de confirmer la véracité de la légende, la place centrale qu’occupe le Morne dans l’imaginaire collectif lui confère un rôle essentiel, dans un pays où l’abomination de l’esclavage a longtemps été minorée…

L’Aapravasi Ghat

Avec l’Aapravasi Ghat de Port-Louis, c’est la mémoire de ces milliers d’Indiens déportés sur l’île qui est célébrée ! Razziés dans les villes côtières de la péninsule indienne, ou plus ou moins embarqués de force, ils étaient débarqués dans cet austère bâtiment du port mauricien. C’est là, leur identité dûment enregistrée –et leurs noms souvent écorchés par les fonctionnaires anglais- qu’ils étaient assignés aux diverses plantations où ils venaient remplacer les esclaves…

Mais si l’UNESCO a, à juste titre, consacré ces deux sites, comme deux versants d’une même histoire (celle du sucre !), l’île regorge de vestiges, plus ou moins spectaculaires. Dans toutes les agglomérations, on trouve encore (mais pour combien de temps ?) ces élégantes bâtisses en bois qui ont résisté à des dizaines de cyclones ! Construites par les charpentiers de marine pendant toute la période coloniale, elles sont de toutes les tailles… Les plus imposantes sont vite parées du titre de « Château ». Les plus modestes, en ville, sont parfois si humbles que l’on ne les devine qu’à peine…
A Port-Louis, la rue Saint-Georges, qui est celle de l’ambassade de France, en compte quelques-unes absolument remarquables !

Une histoire d’abord navale

Egrenées sur le littoral, trois des cinq Tours Martello construites par les Anglais sont toujours debout. Et celle de la Preneuse, près de Tamarin, a été convertie en petit musée. Impressionnés par la résistance qu’opposa à leurs navires la petite tour de la baie corse de Martella, les Britanniques en érigèrent sur toutes les côtes de leur empire, du Canada à l’Australie… mais en déformant leur nom !!! Ces petites tours rondes, de 12 mètres de haut, pouvaient abriter 25 hommes de troupe et recevoir, en terrasse, une grosse pièce d’artillerie pouvant pivoter à 360° ! La Preneuse, justement, qui doit son nom à une frégate française qui, prise en chasse par les navires Anglais, vint se réfugier dans le lagon…

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Car l’histoire de l’île, et c’est bien normal, est d’abord navale… Comme le rappelle justement le musée de Mahébourg !
Entre autres trésors, on peut y admirer des pièces délicates de porcelaine du Banda ! Navire amiral d’une petite flotte hollandaise qui fit escale à Maurice en revenant de Java, le banda fut pris dans un cyclone et coula près de la côte ouest de Maurice. A son bord, se trouvait Peter Both, qui, quelques années auparavant, avait été le premier Gouverneur de l’île ! Il trouva la mort dans le naufrage…Le musée garde aussi le témoignage de la furieuse bataille de Grand-Port Sud Est, la seule victoire de la marine napoléonienne sur la Royal Navy ! Robert Surcouf et l’importante activité corsaire de Maurice y sont aussi largement évoqués !

Paul et Virginie

Sur le côte Est, à Poudre d’Or, une stèle commémore le naufrage du Saint-Géran, qui eut lieu sur le récif corallien, une nuit de gros temps…Et que Bernardin de Saint-Pierre s’appropria dans son roman bucolique « Paul et Virginie » : l’imagination de l’auteur y fait périr la belle et douce Virginie, qui préfère la mort à la honte d’avoir à se dévêtir pour sauver sa vie ! Ni Paul, ni Virginie n’ont réellement existé…et pourtant, le Saint-Géran n’est connu que grâce aux aventures imaginaires des deux jeunes gens ! Un peu plus au nord, à Bain Bœuf, un autre discret monument marque l’emplacement du débarquement principal des Anglais, lors de leur conquête de l’île, en décembre 1810. Une conquête longtemps fragile, comme en témoigne le Fort Adélaïde, surnommé La Citadelle, et qui surplombe Port-Louis. Cette forteresse, longtemps hérissée de canons menaçant n’avait qu’un objectif : faire échec à toute rébellion de la capitale !

Comme on le voit, l’histoire de notre petite île Maurice n’a pas toujours été calme et pacifique. Sous les frondaisons d’une végétation exubérante, au détour d’une route de campagne et le long du littoral, les témoignages passionnants de ce passé mouvementé ne manquent pas. Il suffit de quitter sa villa pour chercher un peu.